Formaliser l’informel …

C’est la même discussion qui revient à chaque fois dans les soirées, lorsqu’après un dernier verre, on se met à refaire le monde 🙂

Faut quand même se rappeler que, d’après ce rapport ce rapport près de 80% de l’économie africaine est informelle …

En Mai 2021, lors d’un covoiturage, nous en discutions déjà Modou Fall et moi (cc Suzanne NDIAYE). Nous nous rendions à Fimela, pour un weekend d’échange à l’écofarm dans le merveilleux Lodge de Moussa Traoré. (D’ailleurs, appel aux data engineers, des bootcamps y ont lieu régulièrement pour échanger entre pairs et faire progresser la profession ! N’hésitez pas à y aller !).

Modou Fall me parlait de son projet de confection de vêtements sur mesure et de sa démarche pour formaliser et structurer cette activité en mettant en place des processus clairs et bien définis.(déformation professionnelle d’ancien consultant en stratégie peut-être). Ce projet était réalisé en partenariat avec des couturiers qualifiés au Sénégal.

Il a conçu un outil numérique permettant de noter ses commandes. Mais surtout, cet outil permettait aussi de comptabiliser très précisément tous les éléments entrant dans la conception du bel habit traditionnel sénégalais. Ce que ses partenaires couturiers ne faisaient que très peu voire pas du tout.

Modou voulait avoir une estimation très précise de ses coûts de fabrication, dans l’optique de construire un business sain et rentable. Il m’expliquait tous les arbitrages à faire dans ce cadre concernant surtout la relation avec ses partenaires couturiers, non habitués à une démarche aussi « encadrée »: sentiment de surveillance, « inhibition » de leur créativité, recherche d’économie extrême …

Plus récemment, lors de mon arrivée à Abidjan, j’ai eu la chance, par l’entremise de Duplex Eric Kamgang (aka le Parrain), de rencontrer Louis Juste Omgba, un entrepreneur Camerounais.

Juste aborde ce sujet là de façon méga intéressante et plutôt géniale je trouve. Son équipe a développé Jevebara, un outil de mise en relation entre les “grouilleurs” (artisans qualifiés) et les Boss (CSP +en recherche d’artisans).

Les premiers ne bénéficient pas d’un réseau suffisamment profond pour décrocher des contrats et les seconds n’ayant ni le temps ni le réseau nécessaire leur permettant de trouver des artisans qualifiés pour toutes leurs problématiques (travaux de maison, soutien scolaire, entretien …).

En discutant avec lui de sa vision, je me rends compte qu’il ne s’agit pas d’un outil de mise en relation (qui ferait qu’on valoriserait son entreprise en terme de pourcentage d’un GMV). Je me rends compte qu’il s’agira asap plutôt d’un réseau social des grouilleurs (qu’on valoriserait plutôt comme un réseau social professionnel sur un marché peu concurrentiel en fait).

J’ai enfin compris @Louis, après plus de cinq mois à le côtoyer, pourquoi il me dit tout le temps : “mes clients ce ne sont pas les boss, ce sont les grouilleurs” !

Nous discutions lundi de la mise en place par le gouvernement Ivoirien de la CMU (couverture maladie universelle). Beau programme venant résoudre le problème prégnant et stressant de la couverture maladie, à un tarif très très abordable (1.5 euros par mois). En échangeant là-dessus avec 10 de mes voisins au hasard, je me rends compte que très peu connaissent ce programme. Ils sont pourtant les premiers concernés !!! 😭😭😭

Je peux aussi citer un programme d’alphabétisation développé par Dominique Ouattara, avec son école de la deuxième chance à Adjamé. École dont on parle aux grouilleurs régulièrement, et qui sont toujours ébahis de l’apprendre, et qui derrière, en parlent à tous leurs proches 🙂

Ces deux exemples parmi tant d’autres, montrent la difficulté qu’ont les États à informer leurs populations de programmes qui leurs sont pourtant destinés. Je me rends compte que malgré le fait que « tout soit disponible sur internet », les plus précaires et même les moins précaires ont besoin qu’on leur “tienne la main”, et surtout qu’on leur fournisse une information plutôt ramassée. (Google, qui se donne pour mission « d’organiser l’information mondiale, et de la rendre facilement accessible », a encore énormément de travail à faire !!! :)). Surtout que des programmes de formation peuvent être proposés, à des standards améliorant le qualité de l’offre de travail sur les marchés.

L’économiste en moi pense déjà à toutes les applications possibles d’une telle base de données (indice des prix dans la construction, la distribution d’équipements, statistiques ultra précises sur l’emploi, le chômage … ) qui fait que l’intelligence économique peut être un autre business model à explorer.

D’une certaine façon, cela fait partie de notre stratégie chez FindMe avec l’offre B2G que nous avons dans notre roadmap. Aider les collectivités territoriales à interagir facilement avec leurs utilisateurs au travers d’une adresse postale utilisée et facilement référencée. (On prend le pb par tous les bouts :))

Sur ce, beaucoup de courage @Louis pour le développement de ton LinkedIn des grouilleurs … et on te souhaite bien sûr d’être racheté, comme eux, par Microsoft !!!

Publié le
Catégorisé comme economy

Par Romaric ST

Founder @FindMe, insatiable curieux.

2 commentaires

  1. Très instructif…, c’est vrai que le secteur informel est un pilier incontournable de l’économie africaine malheureusement il est souvent négligé.

    Pour ton exemple sur la CMU en Côte d’Ivoire je dirais plutôt que les états africains manquent plutôt de volonté et souvent ils utilisent ce genre de projet pour faire de la politique ce qui fait que les bénéficiaires légitimes n’ont pas vraiment accès au projet.

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